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Réparations d'appareils électroniques vintage



Réparation d'un amplificateur Sony TA-1140

Arrive un amplificateur classique Sony des années 70 auquel le propriétaire tient beaucoup. Il a déjà été réparé, mais "craque" dans les haut-parleurs. Mais en fait un canal fonctionne, l'autre craque très fort et pof d'un coup, plus rien, sauf que je me méfie et coupe tout. Heureusement car il y a un offset continu à la sortie haut-parleur. Parfait pour griller la bobine du woofer ! C'est un ampli push pull classe AB classique alimenté en + et -40V, donc le "rail" central vers le haut-parleur n'a pas de condensateur et doit "naturellement" se placer au repos à 0V. Sauf qu'ici, dès l'allumage je mesure +18V et la tension continue monte lentement et se stabilise à +28V ! Bizarre, car d'habitude si un composant est défectueux, le rail central file au taquet à + ou - la tension d'alimentation. Ici le circuit fonctionne mais dérive grave. Jamais vu ça. D'habitude il y a un circuit de protection qui, en cas de détection d'une tension continue en sortie, coupe tout. Or ici il n'existe pas, il n'y a qu'un dispositif de détection de surcharge assez étonnant : une ampoule en verre avec un bilame qui, en cas de courant trop fort (court-circuit ou impédance trop basse), s'échauffe et coupe la sortie. Simple et efficace. Ils sont encadrés en jaune sur la photo.

Un grand classique, la commande de volume linéaire dénote un peu à mon goût

Pour commencer je retire les transistors de puissance, les amplis class AB fonctionnent sans, il n'y a juste pas de puissance. C'est très pratique et évite de bêtement détruire des transistors de puissance lors de tests et de diagnostics. En plus, ici ils sont bons et l'un d'eux a été remplacé par un modèle équivalent, suite sans doute au dépannage précédent.

Bizarre ces cartes câblées avec un connecteur non utilisé!

Il y a 3 circuits imprimés câblés/soudés en direct mais dont 2 ont également un connecteur à pistes imprimées ... non utilisé ! Bizarre, un design réutilisé différemment ? Il est connu que les connecteurs enfichés sur un circuit imprimé ne sont pas très fiables ce qui peut vite provoquer des problèmes audios. Peut-être que le modèle précédent d'ampli utilisait ces cartes avec le connecteur, mais que suite à des problèmes, le modèle suivant a réutilisé les même cartes mais cette fois en soudant directement les fils sur les cartes, ce qui est très sûr. La carte driver a une découpe posée dans une fente et ce qui est vraiment super est que le châssis a une même fente plus haut dans laquelle on peut déplacer la carte et ainsi avoir accès très facilement des 2 côtés pour faire des mesures et dépanner sous tension. Et oui, les fils ont été allongés de quelques cm pour permettre le déplacement de la carte. Ah merci d'avoir pensé à nous pauvres techniciens réparateurs, c'est un vrai plaisir de travailler dans ces conditions (voir dans les cadres oranges sur la photo).

Comme il y a une dérive du rail central, je pense à vérifier les condensateurs, si l'un d'eux fuite on pourrait voir ce genre d'effet. Je remplace ceux qui sont douteux, mais ce n'est pas ça. Je trouve une résistance qui est "grise", elle a eu très chaud, elle mesure 20 ohms au lieu de 6,8 ohms. Remplacée, rien ne change. Je remplace les 2 transistors autour de cette résistance car il y a eu un courant trop fort. Attention, Sony est une marque japonaise et les transistors européens ou américains équivalents n'ont pas le même brochage, il faut donc faire bien attention et croiser les C (Collecteurs) et B (Bases). Remplacés, rien ne change. Après diverses mesures des tensions de polarisation et un peu d'intuition je remplace le transistor d'entrée et bingo, c'est ça !

Je mesure le transistor fautif avec mon testeur, mais il est déclaré OK ! Mon hypothèse est que ce transistor s'est dégradé dans un premier temps en provoquant de brutales pointes de courant (les craquements) puis s'est stabilisé mais avec un courant de fuite qui change avec la température (d'où la dérive DC). C'est la seule explication plausible, vicieux. Les transistors remplacés sont encadrés en bleu sur la photo.

Carte driver, voir explications dans le texte

Je remonte les 2 transistors de puissance, aucun souci. Et bien sûr je vérifie les courants de polarisation de repos des transistors de puissance sur les 2 canaux. Le manuel indique qu'il faut régler le trimpot pour ne pas dépasser 50mV aux bornes d'une des résistances de puissance. Sur le canal qui était OK, je mesure 45mV, c'est très bien. Mais sur l'autre que je viens de réparer je vois 80mV ! C'est beaucoup trop ! Le risque est que, en charge à pleine puissance, le courant de travail va faire chauffer les transistors, c'est normal, mais du coup le courant de repos augmente également et comme il est déjà à 80mV, l'emballement thermique est possible, ce qui peut rapidement détruire transistors et résistances de puissance, si le circuit de compensation n'est pas assez rapide ! C'est souvent le cas et c'est ainsi que beaucoup d'amplis meurent. Manifestement le technicien précèdent avait bien réparé l'ampli, mais avait oublié ce réglage de bias. Je règle les 2 canaux à 35mV pour être tranquille. Et pourquoi pas à 0mV pour être encore plus tranquille ? Car mettre le courant de repos trop bas induit une distorsion à faible volume ce qui n'est pas non plus l'objectif. Il faut trouver un compromis, j'utilise l'oscilloscope pour vérifier que la sinusoïde en sortie est bien "lisse".

La lampe témoin d'allumage est HS. Bizarrement c'est une ampoule de 2,5V sur un enroulement indépendant. Et encore plus bizarrement cet enroulement n'arrive pas à allumer un LED ! Il doit être HS. J'installe ma LED avec une résistance adéquate sur l'alim de 40V, c'est bon, mais j'ai un léger ronflement ! Il me faudra déplacer la connexion de masse de la LED sur le point central de "l'étoile" de masse, sur les condensateur de filtrage, pour que le ronflement disparaisse. Une boucle de masse est vite créée.

Un chouette ampli remis en ordre.