Schmitronic

Réparations d'appareils électroniques vintage



Restauration d'un flipper Gottlieb Super Orbit de 1983

Arrive une Gottlieb … et de suite ça commence très fort : toutes les pièces métalliques du plateau sont à 150 VAC ! Pourtant la terre arrive bien sur le transformateur et sur les tresses qui courent sur les portes et pièces de la caisse. Finalement je découvre que la masse des plaques électroniques n'est plus reliée à la terre du réseau électrique ! Je ne sais pas où et comment était faite cette liaison cruciale, qui est bien indiquée sur les plans, mais je ne cherche pas trop : je fixe un gros fil entre la terre qui arrive au transformateur et la plaquette de masse qui regroupe tous les fils de masse qui vont aux cartes.

Le fil de masse qui relie la terre à la plaque de masse

En fond de caisse, je vois le boitier avec l'interrupteur d'allumage et un peu plus loin 2 fils dont les bouts sont torsadés ensemble, nus. A un moment d'inattention, machine éteinte, je les effleure et m'électrocute ! Pfff certains font vraiment n'importe quoi … ici ces 2 fils allaient au boitier du fusible principal. Ce boitier d'origine est bizarrement prévu pour des petits fusibles 5 mm alors que partout ailleurs Gottlieb utilise des gros fusibles 6 mm. Je reconnecte tout correctement et remet un fusible. Gottlieb n'a jamais résolu le souci d'activations intempestives et aléatoires des bobines à l'allumage, et donc lorsque plusieurs bobines démarrent en même temps, l'appel de courant est trop fort et le fusible principal saute ! Ici pour résoudre le souci quelqu'un a éliminé le fusible ! Mais la cause fondamentale et encore un raté de design du constructeur. Certains techniciens ont trouvé la parade et proposent de faire quelques modifications dans les circuits. Malheureusement, ici le temps (et le coût) pour améliorer la machine sont trop élevés.

La machine démarre, mais bloque souvent, les afficheurs affichent un peu n'importe quoi, les lampes commandées sont toutes éteintes, un batteur est inerte, le crédit est à zéro mais on arrive à lancer une partie … mais que pour un joueur ! Les contacts de monnayeur ne réagissent pas. Pour les lampes commandées, c'est simple : un fusible de 3A a été mis à la place d'un fusible de 5A et il a claqué …

Je commence par vérifier l'alimentation, elle donne 5,54V, c'est trop, j'ajuste le petit trimpot mais rien ne change, normal, le trimpot est mort. Je vois aussi qu'une diode zener de 8,2V est morte. Je remplace le tout et ajuste la tension à 5 V. Le régulateur est monté bizarrement sur la carte alim : il faut dessouder 2 fils et démonter le régulateur pour avoir accès au côté pistes du circuit imprimé ! Et il est impossible de souder les 2 pattes du régulateur aux pistes, d'où les fils ! Encore un design à la noix indigne d'un vrai électronicien. J'ai déjà vu des milliers de circuits, mais jamais des cornichonneries pareilles. Gottlieb …

Pour le problème d'affichage sur le petit afficheur des crédits, la séquence est rapidement claire : le compteur en self test donne 0 -> 4, … La ligne de données D3 est haute en permanence. Après confirmation que la sortie D3 du circuit de buffer Z22 (74175) est bien haute en permanence alors que l'entrée D3 varie bien, je remplace ce circuit défectueux, problème résolu.

Sans prévenir, sans doute suite à toutes les manipulations, la machine ne démarre plus. L'horloge de la carte MPU fonctionne, mais je ne vois aucun signal vivant autour du microprocesseur. Il me reste un 6502 en stock, je le remplace et ouf la machine repart ! Ce genre de situations m'agace, on répare, on avance et puis paf, autre chose claque et on régresse. Cela ne m'arrive qu'avec les Gottlieb …

Curieusement l'afficheur indique que le crédit est à zéro mais je peux lancer une partie ... mais que une !!! Pas question de jouer à plusieurs ! Aucun des 3 contacts de monnayeur ne répond, par contre le contacteur de self test réagit ... pendant un temps. Je vérifie le câblage et finis pas constater que les diodes de ces contacts ont été trafiquées, certaines sont au silicium alors que les originales sont au germanium. Encore un design tordu de Gottlieb : mélanger un technologie déjà obsolète à l'époque (les semiconducteurs au germanium datent des années 1950 et sont réputés fragiles et chers) avec une meilleure, disponible, fiable et moins chère. Franchement je ne comprends pas les motivations de Gottlieb, c'est n'importe quoi, désolé. Je teste en installant des diodes silicium ... et cela ne fonctionne pas. Je déterre alors mon 2ème stock de « composants historiques de collection pour le musée » (j'ai restauré un orgue électronique à tubes Hammond de 1938, donc j'ai des composants qui couvrent toute l'histoire de l'électronique : pour les connaisseurs j'ai même des triodes et pentodes 56 et 57 ... neuves d'époque dans leurs cartons d'origine). Bref, je retrouve ces bonnes vieilles diodes au germanium utilisées comme détecteur dans les premières radios à transistors, des OA81. La différence est que la tension de seuil des germaniums est de 0,3V au lieu des 0,6V des siliciums. C'est quand même bizarre que les 0,3V font une différence de sensibilité pareille. Je les soude et cela marche ... partiellement ... un moment ! En effet, les contacts des monnayeurs fonctionnent, on peut lancer le jeu pour plusieurs joueurs et puis, paf plus rien, mais le self test ne démarre plus, rien ! Encore une régression. Gottlieb me sort par les oreilles ! Le diagnostic est simple : avant j'avais un ligne de la matrice des contacts qui était morte, maintenant j'ai une colonne également. Mon voltmètre, en mode contrôle diode, me confirme le diagnostic : les jonctions d'entrée et de sortie des circuits pour le strobe et le return sont en court-circuit. Je redémonte encore une fois la carte MPU, remplace les 2 circuits Z11 et Z14 et enfin tout réagit normalement.

Les diodes OA81 montées à la place des diodes au silicium

J'installe une batterie déportée et sans grande surprise la MPU ne garde quand même pas la mémoire, la RAM 5101 est morte. Rebelote, démontage-remplacement-remontage. Cette carte MPU tombe littéralement en ruine.

Pour mettre en free play je vois sur internet qu'il suffit de lier les sorties des contacts du bouton de lancement de partie et d'un monnayeur pour envoyer un double signal à la MPU. J'essaie, mais cela ne fonctionne pas, seule une partie est lançable ! Tiens, la machine fonctionnait de cette manière au début, pourtant je n'ai pas vu cette liaison. Bref, on installera un double contact pour permettre de créditer.  

Cette fois l'électronique semble opérationnelle et stable. Je remets les batteurs en ordre : les EOS ont été rendus inopérationnels, donc il suffit de garder les batteurs levés pour les griller en moins d'une minute, super intelligent comme réparation ... il y en a qui ne doutent de rien. Alors qu'il suffit de décrasser ces contacts (à la Dremel) pour faire à nouveau briller le tungstène des grains et jouer sans souci.

Ce plateau comporte une vari-target, j'aime bien ce genre de gadget qui donne des points en fonction de la qualité (force) du tir. Sauf que le pauvre mécanisme a été torturé : les lames des 2 contacts font des zigzags et le châssis de la bobine de reset a été tordu à la très grosse pince ! Mais enfin, il suffit de regarder : il y a 2 vis dans un oeillet qui permettent de régler très finement la position de la bobine pour permettre un blocage et un relâchement sûrs. Après redressement du châssis du relais et des lames, cela m'a pris moins de 3 minutes pour réaliser une réglage parfait de la bobine et des contacts.

Il reste à faire fonctionner la porte commandée qui ramène la bille au lanceur : la bobine grogne mais la porte ne s'ouvre pas. D'abord le pivot sur l'axe est trop serré, l'axe ne tourne pas facilement, 1 mm de jeu et une goutte d'huile laisse l'axe tourner librement. Une tige métallique transforme le mouvement de translation de la lame du relais en rotation d'un quart de tour de la porte. Mais le positionnement de la « bielle » est incorrect, l'effort se répartit mal et la rotation ne se fait pas. En fait, il suffit de repositionner le pivot de bielle sur l'axe de rotation de quelques degrés pour que le mouvement se fasse naturellement et aisément. Bref, il faut regarder, réfléchir, regarder, réfléchir puis agir.

Finalement la machine roule et malgré mes critiques envers Gottlieb, je dois admettre que le plateau « circule » vraiment bien. Et malgré l'âge, la bille vole dans tous les sens et il faut de bons réflexes pour jouer !