Schmitronic

Réparations d'appareils électroniques vintage



Quelques astuces pour la réparation d'ampli audios

Le truc du pro !

Pour les dépannages d'amplis push-pull toute la littérature indique qu'il faut bien vérifier tous les composants avant allumage car en cas de problème d'un seul, plusieurs autres vont griller en chaine. C'est vrai. Pour diminuer le risque et limiter les dégâts éventuels, j'utilise d'abord une ampoule en série du coté de l'alimentation secteur pour limiter le courant comme déjà décrit par ailleurs. En réétudiant le schéma type d'un ampli push-pull on voit clairement les 2 étages d'amplification qui se suivent : celui des 2 transistors drivers qui pilotent chacun leur transistor dans l'étage de puissance. Et en fait on peut faire fonctionner l'ampli ... SANS installer les transistors de puissance ! Tout le circuit reste stable en continu et en alternatif, les drivers génèrent l'onde complète et elle est disponible même avec quelques watts sur les haut-parleurs ! L'étage de puissance ne fait que copier l'onde des drivers, c'est juste un amplificateur de courant. Je teste toujours le redémarrage des amplis réparés de cette manière, cela m'évite de bêtement griller de coûteux transistors de puissance !

Par contre dans les amplis de la génération TSA, le schéma est similaire, et sans les transistors de puissance au germanium (coûteux AD146) l'ampli est stable, néanmoins les signaux alternatifs de sortie sont forts distordus. Donc je teste juste la partie "continue".

Le bias (courant de repos des transistors de puissance) peut être réglé de 2 manières :

Donc je fais le test et la mesure indirecte d'abord, puis je remonte les transistors de puissance et revérifie la tension aux bornes de la résistance de puissance.

Réparation de l'ampli original d'un Vogue

Je reprends le dépannage de l'ampli original d'un Vogue. Le niveau de sortie au repos devrait être proche de 0V, or je le mesure à -32V ! Tous les transistors drivers et de puissance sont OK, les résistances de puissance également, je vérifie le circuit de bias et court-circuite les trimpots pour ne prendre aucun risque. En fait, un ampli classe B (push-pull) qui ne se stabilise pas en DC à 0V mais se colle contre l'une des 2 alimentations + ou -32V, ne risque rien, car il y a toujours un des 2 transistors de sortie qui ne conduit pas et donc il n'y a aucun courant, donc pas d'échauffement.

Le principe de ces amplis est (relativement) simple : un étage d'entrée sous forme d'ampli différentiel Q12 et Q13, puis un étage d'amplification classe A Q14, puis un étage push-pull classe B de drivers Q15 et Q16 avec circuit de bias et finalement l'étage de puissance push-pull Q17 et Q18. La ligne de sortie revient en contre-réaction via la résistance R69 vers l'étage d'entrée. Voir schéma.

Au moindre souci dans une boucle de régulation, le signal dérive et "part au taquet", d'un côté ou de l'autre de l'alimentation. Et aucune tension mesurée n'est correcte par rapport à celle du schéma puisque l'ensemble de la boucle a dérivé. Machine éteinte, je vérifie tous les composants, rien à signaler. Seule solution forcer un signal à la bonne valeur dans la boucle et voir où ça dérape. Je mets donc la base de Q13 à la masse, l'ampli différentiel sort bien 0V, la tension base-émetteur de l'ampli classe A Q14 tombe à 0,2V au lieu de 1,2V avant, mais le collecteur reste à - 32V ... tiens tiens. C'est donc cet étage qui ne fonctionne pas : transistor Q14 ou résistance R71 claquée. Mais à l'ohmmètre les 2 sont bons.

En mesurant la tension aux bornes de R71, j'entends un petit clic dans le haut-parleur, yes, une tension continue vient de sauter. Je vérifie le signal de sortie à l'oscilloscope et l'effet se confirme, la ligne saute de -32V à -3V et inversement à chaque fois que je touche la connexion supérieure de R71 ! Bingo, un faux contact, mais inhabituel car à chaque choc sur la patte, la tension reste stable, soit à -32V soit à -3V ! En dessoudant la patte je découvre une soudure froide d'usine. Panne vicieuse, mais avec un peu de méthode, de compréhension, d'expérience et de chance on y arrive.

Ampli SHP3 avec la boucle de régulation en jaune

Réparation d'un autre ampli SHP3

Finalement, il y a pas mal à dire sur ces amplis audio de Seeburg. Leur design n'est pas mal du tout, mais vu l'âge et les conditions subies, au moins un canal est en panne sur toutes les machines que je reçois.

Voici quelques explications sur une panne inhabituelle que je n'ai pas trouvées décrites sur internet, ni dans le manuel de Tony Miller.

Un SHP3 avec une alimentation OK et un canal mort du côté puissance, le préampli est OK. A l'inspection visuelle, le Stabistor CR16 et la résistance R62 du circuit de polarisation (bias) sous le radiateur sont parfaitement grillés à point, il en reste peu de choses ! Par contre les 2 transistors de puissance et les 2 drivers sont OK, peut-être ont-ils été remplacés ? Mais sans résoudre la panne évidemment …

Bon, un Stabistor, qu'est-ce que c'est que ce composant ésotérique ? Je trouve peu de documentation et encore moins où en acheter. Sur le schéma on voit une double diode, sur internet Ron Rich dit pareil, il semble qu'on puisse souder 2 diodes quelconques en série et les monter à la place du Stabistor. Ce montage permet sans doute de garantir une chute de tension stable de 1,2V, équivalente à la tension des jonctions base-émetteur des 2 drivers pour les polariser juste au point de conduction. Je risque le coup et soude 2 diodes 1N4002 en série et remplace la résistance.

J'allume prudemment (je mets une lampe de 240V/25W en série dans l'arrivée secteur), rien ne fume ni ne chauffe, c'est déjà pas mal, le circuit est stable et je mesure bien 1,4V entre les bases de Q15 et Q16 ! Mais le point milieu qui devrait se trouver autour de 0V est à -28V, donc collé à l'alimentation inférieure. Comme les tensions autour de Q12 sont normales, c'est soit R71 ou Q14 qui a un souci. R71 est OK, je remplace Q14 par son équivalent officiel Seeburg un 2N2907 (j'en retrouve un dans mon stock d'adolescent de 1988 !), PNP, 40Vceo, 600mAc. En première lecture, cette fois je mesure le point milieu au repos à 0 volt (+1V sur la base de Q15 et -0,5V sur la base de Q16 pour être précis). Je teste avec un signal audio et cela fonctionne … pendant quelques secondes ! Les connaisseurs vont me dire que c'est le circuit SOS qui s'est activé car il a détecté une surcharge et qu'il a coupé le préampli. Je sais qu'avec l'âge ce circuit de SOS devient trop sensible ou est carrément défectueux, je me suis déjà fait avoir plusieurs fois, maintenant je le désactive (au moins temporairement) en coupant le fil rouge qui sort de la carte driver sur la broche 16 ! Je coupe aussi la bobine située entre les canaux qui rend les basses monophoniques, car cela crée de la confusion pour savoir quel canal de la carte driver ou de la carte préampli est en panne. Mais je m'égare, bref, non ce n'est pas le circuit de SOS qui coupe le son.

En remesurant, je constate que le point milieu dérive, et passe lentement de 0V à 4,5V, j'ai même l'impression que Q14 chauffe ! Je bloque la régulation en reliant les bases de Q12 et Q13 et la dérive à 4,5V est maintenant instantanée ! Donc il y a un souci de polarisation de Q14 ou de Q14 lui-même. Mal polarisé en continu, l'alternatif ne passe plus. R66 de 680 ohms a vieilli à 720 ohms, mais je doute que ce soit la cause. Je cherche d'autres équivalents à Q14 et teste avec un 2N2907 et un 2N4036, plus costaud (Vce 65V et Ic 1A). Seule différence importante : le gain (hfe). Seeburg indique un hfe de 30, or le 2N2907 fait 120 mais le 2N4036 que j'ai fait 25. Comment je le mesure ? Mais avec mon super testeur de composant à 15 euros ! Génial cet appareil.

Et là avec ce 2N4036, bingo, le point milieu reste calé autour de 0V en continu ! Pas évident quand même, mais c'est sympa de revenir aux fondamentaux du silicium ! Il reste à régler les trimpot de bias avec la méthode de Tony Miller : l'ajuster pour avoir 1,650V entre les bases de Q15 et Q16 au lieu de 2 mV (très difficile à mesurer précisément) entre TP1 et le collecteur de Q17 comme préconisé par Seeburg.

Allez zou, au suivant, il m'en reste encore quelques-uns à réparer !